Cher camarade Gérin,

J’ai bien reçu ta circulaire relatant ta conférence de presse, tenue à Lyon le 27 janvier dernier et je t’en remercie.

Tu y sollicites le soutien de tous les communistes pour t’aider à porter ta candidature dont le but est, affirmes-tu de « rendre ses couleurs à la France » et de défendre aux présidentielles une candidature clairement issue du PCF.

Nous ne pouvons qu’être intéressés par ta démarche d’autant que tu affirmes dans ce même texte vouloir défendre la nation, te situer dans la lignée des luttes républicaines, réindustrialiser le pays, remettre le socialisme à l’ordre du jour et même promouvoir la francophonie.

En même temps, sauf erreur de notre part, nous constatons que ta brochure ne fait pas état de la nécessaire sortie de l’euro et de l’UE sans laquelle il serait impossible d’appliquer le quart d’un programme de rupture anticapitaliste.

D’autre part, tu écris qu’il faut « arrêter de crier au populisme ». Sous réserve de définir ce mot nous pourrions en convenir à ceci près qu’il est extrêmement important, -et encore plus au moment où les peuples arabes sont engagés dans des luttes révolutionnaires-, de faire croire que les communistes ont quoi que ce soit de commun à faire avec l’UMP, fût-ce sur le thème de la burka-, au nom d’une mythique front « laïque » ou « républicain » : tant il est clair que l’ennemi principal de la République et de la laïcité est le proconsul du patronat et de l’UE qui siège à l’Elysée.

Enfin, pour avancer tes critiques à l’égard de la direction du PCF (qui en est aujourd’hui à défendre à cor et à cris l’euro, Pierre Laurent voulant sans doute justifier sa promotion au rôle peu enviable de président du PGE), tu écris constamment « « nous… « arrêtons »… », comme si les opposants marxistes et léninistes à la direction liquidatrice du PCF, qui a tant contribué à désarmer idéologiquement notre peuple, avait le moindre titre à engager authentiquement les communistes restés fidèles au combat de classe. N’y a-t-il pas là un risque majeur de faire croire que le PCF tel qu’il est devenu après au moins vingt ans de « mutations » réformistes, peut encore porter comme tel, sans démarcation claire du courant révolutionnaire et du courant liquidateur, un quelconque projet de rupture indépendant de la social-eurocratie ?

Tu affirmes également que ta candidature vise à « faire réussir la gauche ». Cela signifie-t-il que tu croies en quoi que ce soit que, avec un score communiste même doublé ou triplé aux prochaines présidentielles, il serait possible de « tirer à gauche » le PS et DSK, ce candidat de l’oligarchie capitaliste mondiale dont le seul programme est de mettre définitivement fin à la souveraineté économique et financière de la France ? La question qui sera en réalité posée à tout député PCF après les élections législatives ce sera de savoir, si le PS l’emporte sur son programme euro libéral mâtiné de « CARE » (et vive la langue française !), si le groupe du PCF fera ou pas partie de la majorité gouvernementale (soit au gouvernement soit seulement au parlement) ou s’il s’inscrira clairement dans opposition POPULAIRE au gouvernement des Zapatero et Papandréou français, ainsi qu’à la droite et à l’extrême droite quitte à voter certains textes s’ils s’en trouve quelques-uns de positif par hypothèse d’école. Nous aimerions avoir ton avis sur cette question étant donné que lors de la législature 1995/2002, seul Georges Hage avait voté contre l’investiture de Jospin au titre du groupe du PCF.

Surtout, il est dommage que cette candidature à la candidature soit autoproclamée. Tous les thèmes que tu déploies au positif dans ta brochure ont été inlassablement travaillés et propagés, avec de très modestes moyens, par le PRCF et par ses prédécesseurs de la première Coordination communiste et du CNUC. Le mérite de ces regroupements communistes est d’avoir démocratiquement organisé les communistes en rupture de mutation pour éviter l’auto proclamation et permettre un contrôle démocratique des militants sur les dirigeants, à l’encontre de ce qui s’est passé au PCF mutant. Il est également d’appeler, hier, aujourd’hui, demain, à combattre la criminalisation du communisme, à défendre l’histoire du Mouvement communistes international et du PCF issu de Tours, d’inviter aujourd’hui tous les communistes et groupes communistes, qu’ils militent à l’intérieur ou à l’extérieur du PCF, à former ensemble démocratiquement une convergence communiste d’action totalement indépendante des dirigeants faillis du PCF, ces relais du PS maastrichtien à l’intérieur du mouvement ouvrier.

C’est pourquoi il serait utile, plutôt que de ficeler d’avance un programme et une candidature pour les présidentielles, de coorganiser démocratiquement une rencontre nationale de tous ceux qui veulent promouvoir une candidature franchement communiste, sur un programme franchement communiste, aux présidentielles.

C’est la seule manière d’être efficace, de créer la dynamique.

Tout cela dit dans un esprit constructif et positif et en souhaitant au besoin te rencontrer ès qualités pour en débattre très franchement et très démocratiquement.

G. Gastaud, militant du PCF de 1972 à 2004, ancien secrétaire de la section de Lens du PCF, secrétaire national du PRCF